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L'observation de la Terre par satellites pour lutter contre la crise climatique

Dernière mise à jour : 5 juil. 2022

Auteur : Jennifer Fernando

1. Dérèglement climatique, une menace bien réelle


Le dérèglement climatique est en marche - dérèglement et non changement climatique, car c’est bien un bouleversement brutal du système climatique qui est constaté, engendré par les émissions anthropiques de gaz à effet de serre depuis l’ère industrielle. Ces émissions sont essentiellement issues de la combustion des énergies fossiles et de la déforestation qui ont conduit à une accumulation de 2040±310 milliards de tonnes de dioxyde de carbone entre 1750 et 2011, dont 40% stockées dans l’atmosphère, le reste étant stocké dans les océans et dans les sols.


L’air ambiant se réchauffe. Les preuves sont multiples et le constat est sans appel. La température de l’atmosphère a ainsi augmenté de 0,85°C en moyenne entre 1880 et 2012. Cette variation peut sembler dérisoire. Il n’en est rien ! C’est tout l'équilibre du cycle de l’eau qui en est perturbé, modifiant la répartition, la fréquence et l’intensité des précipitations et des évaporations à la surface de la planète. Les sécheresses et les inondations deviennent plus intenses et plus longues tandis que les tempêtes et les cyclones tropicaux sont de plus en plus fréquents et violents. Ces événements météorologiques extrêmes, le plus souvent imprévisibles, engendrent des environnements hostiles où les terres deviennent non cultivables ou trop dangereuses pour y vivre.


Le niveau de l’océan augmente et s’est élevé de près d’une vingtaine de centimètres entre 1900 et 2017 et augmente à ce jour de 0,3 mm/an en moyenne depuis 1993, un phénomène induit par la dilatation de l’océan, la fonte des glaces du Groenland et dans une moindre mesure celles de l’Antarctique. Les régions touchées par ce phénomène sont en premier lieu les zones en dessous ou proche du niveau marin, en d’autres termes les petits États insulaires, mais aussi les deltas comme la région du Gange où le Bangladesh est déjà fortement impacté.


L’acidité de l’océan augmente. Absorbant près de 30% des émissions anthropiques de dioxyde de carbone, l’océan est un puits naturel très efficace. Il permet de ralentir la hausse de température atmosphérique. Mais, en piégeant le dioxyde de carbone, l’océan s’acidifie lentement contribuant ainsi au bouleversement de tout un écosystème marin très sensible aux variations des températures et de pH.


La liste n’est pas exhaustive, mais elle permet de saisir l’ampleur de l’influence de l’Homme par ses émissions de gaz à effet de serre sur notre environnement et notre climat : un réchauffement global, mais avec des impacts locaux spécifiques. C’est l’un des principaux défis du dérèglement climatique. Le réchauffement global menace également dangereusement nos ressources naturelles en réduisant nos réserves en eau douce, en rendant certains sols impraticables à la culture et en contribuant au recul de la biodiversité, menaçant directement l’humanité.


Les prédictions du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) nous annoncent la couleur pour les prochaines décennies[1], [2] : les conséquences d’un tel réchauffement planétaire seront extrêmement dommageables et pour certaines irréversibles. La hausse du niveau marin va s’accélérer avec une élévation de 74 centimètres (avec une incertitude d’une vingtaine de centimètres) d'ici à la fin de ce siècle. Les précipitations vont être plus intenses et plus fréquentes aux moyennes latitudes et dans les régions tropicales humides, tandis que les sécheresses vont être plus marquées dans les régions déjà arides comme les côtes méditerranéennes, le sud-ouest des États-Unis ou encore l’Afrique australe. L’océan, quant à lui, va devenir de plus en plus acide affectant durement la faune et la flore marines.


2. D’autres défis à également prendre en compte


Depuis plus d’un siècle, l’Homme, par son intervention, a considérablement modifié le climat, mais aussi le volume et la répartition des ressources naturelles disponibles à la surface du globe. Pendant des décennies, son action a été menée sans se préoccuper du coût social et environnemental et sans avoir de vision long terme et par conséquent, sans régulation ni contrôle.


En conséquence, la quantité et la qualité des ressources naturelles sont aujourd’hui dégradées. La croissance économique et démographique et les changements dans l’utilisation des terres ont poussé les usagers des ressources naturelles à les utiliser et les consommer au-delà des réserves disponibles, et cela dans plusieurs régions du monde. Leur surconsommation, leur surexploitation, leur gaspillage et leur dégradation sont devenus d’importants enjeux de société, car à l’origine de certaines menaces telles que l’insécurité de l’eau et alimentaire, la pauvreté ou encore de conflits dans le monde. Aujourd’hui, plus de 2 milliards de personnes n’ont pas accès à une eau potable[3], soit près d’un tiers de la population mondiale et plus de 3 milliards de personnes sont affectées par la dégradation des sols[4], des menaces qui ne cessent de s’étendre et de s’aggraver.


À cela, le réchauffement planétaire vient exacerber ces pressions. En effet, il affecte un certain nombre d’extrêmes météorologiques dans toutes les régions du globe tels que les vagues de chaleur, les précipitations intenses et les sécheresses complexifiant ainsi la gestion des ressources naturelles et induisant de nouvelles problématiques de gestion de crise.


La biodiversité est en déclin, annonçant une sixième extinction de masse des espèces. L’IPBES, la plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, avait tiré la sonnette d’alarme en 2019 en mettant en lumière que près d’un million d’espèces étaient menacées de disparition[5].


Ces menaces dites écologiques sont autant de facteurs liés aux activités humaines qui mettent en péril directement l’habitat naturel de la faune et la flore et notre survie.


3. Atténuer, s’adapter ou les deux ?


Dans le contexte de réchauffement global, de dégradation de l’environnement et du recul de la biodiversité, des mesures concrètes sont nécessaires afin de tendre vers une société sobre en carbone et plus résiliente et adaptée face aux effets du dérèglement du climat et une gestion durable des ressources naturelles.


Pour cela, la législation relative à l’environnement, le climat, la biodiversité et au développement durable se structure au fil du temps autour de divers textes internationaux, européens et nationaux. Parmi ces textes, on compte en particulier l’Accord de Paris sur le Climat.


Adopté en 2015 par les États membres des Nations unies, l'Accord de Paris définit les objectifs majeurs à atteindre à l’échelle internationale afin de minimiser le réchauffement global et ses impacts à long terme tout en fournissant un cadre d’évaluation pour contrôler l’évolution des réductions des émissions anthropiques par les Parties impliquées. L’Accord de Paris est ambitieux, car il propose comme objectif de limiter le réchauffement global en deçà de 2°C entre l’époque préindustrielle et la fin de ce siècle, et de poursuivre les efforts pour limiter la hausse de température à 1,5°C (Art. 2). C’est le premier objectif chiffré à long terme connu dans l’histoire des négociations sur le climat.


Dans son dernier rapport, le GIEC réaffirme l’absolue nécessité de réduire fortement, dès maintenant et de façon pérenne les émissions anthropiques de gaz à effet de serre et plus particulièrement le CO2 et de ramener à zéro ses émissions nettes d’ici 2050 tout en diminuant les autres gaz (méthane, protoxyde d’azote, etc.) pour limiter le réchauffement en deçà de 1,5°C par rapport à la période préindustrielle. Cela implique une transformation sans précédent des sociétés vers des sociétés neutres en carbone, l’un des plus grands défis de l’humanité. Mais, si l’augmentation de la température globale dépasse 1,5°C alors le recours à des mesures dites d’émissions négatives est inéluctable afin d’éliminer le CO2 de l’atmosphère pour la décroitre. Plus le dépassement sera important et durera dans le temps, plus le recours à ce type de mesures sera conséquent. Il existe 2 types de mesures d’émissions négatives : le renforcement des processus naturels qui permettent la séquestration du CO2 atmosphérique (ex., en augmentant les capacités des forêts, des sols et autres puits à piéger le carbone) et l’utilisation de processus chimiques, par exemple en capturant directement le CO2 depuis l’air ambiant et en le stockant ailleurs (ex., dans le sous-sol). Parmi les mesures les plus matures, on compte notamment les procédés de bioénergie avec capture et stockage de carbone (BECCS) (le CO2 atmosphérique est ainsi piégé par les plantes et arbres au cours de leur croissance et la matière organique ainsi produite (biomasse) est brulée pour produire de l’énergie) et la séquestration via l’agriculture, les forêts et l’utilisation des sols (AFOLU).


Mais, l'atténuation des émissions des gaz à effet de serre anthropiques n'est pas le seul volet de cet accord. Vue comme un aveu d'échec pendant plusieurs décennies, l'adaptation n'était pas une option dans les négociations climatiques. Cependant, grâce au travail du GIEC et des "bâtisseurs" de l'Accord de Paris, l'adaptation est aujourd'hui au même niveau que l'atténuation. En effet, le dérèglement climatique a déjà un impact sur les sociétés et les écosystèmes à travers le monde et il est urgent, compte tenu des prévisions du GIEC et de la finitude des ressources naturelles, de réduire l’exposition et la vulnérabilité aux risques et de renfoncer la résilience des sociétés.


4. Le rôle clé des données satellitaires


Le domaine de l’observation de la Terre par satellites concerne la collecte d’information (physique, chimique et biologique) relative au système Terre depuis son orbite par le biais de la télédétection. Complémentaire aux données de terrain, elle permet de dériver à la fois des informations clés, depuis l’échelle globale à locale, et de façon répétée, de l’océan, l’atmosphère, les terres émergées et la biodiversité ainsi que des phénomènes naturels (tempêtes, inondations, sécheresses, feux de forêt, etc.) et anthropiques (pollution de l’air, de l’eau). Il existe à ce jour une large gamme de capteurs capables de suivre les cycles du carbone et de l’eau en passant par la circulation océanique et celle des vents et de les caractériser, une étape indispensable pour mieux comprendre la dynamique de la Terre et sa réponse vis-à-vis des activités humaines.


Par le caractère synoptique des données satellites (i.e., résolution spatiale, grande fréquence de revisite) et la grande diversité des capteurs à bord, l’occupation des sols ainsi que l’évolution des écosystèmes et des phénomènes naturels et des activités anthropiques peuvent être mieux caractérisées, et cela en quasi-temps réel. Les données satellites permettent également de s’affranchir des frontières, contrairement aux données in situ, un avantage considérable compte tenu des divers défis en cours et à venir qui dépassent le plus souvent les limites d’un pays.


Initialement destinées à la communauté scientifique, les données satellitaires deviennent accessibles à des profils d’acteurs très variés permettant ainsi de les éclairer dans la prise de décision. Associés à des données de terrain et à des modèles numériques, les données de l’observation de la Terre par satellites permettent le développement d’outils innovants dans le but d’assister les populations, les décideurs, les entrepreneurs, etc. à mieux comprendre le climat et son évolution et à transformer notre société en une société plus sobre en carbone, plus résiliente et adaptée face aux effets du dérèglement du climat et plus respectueuse de l’environnement et de ses ressources naturelles.


La Figure 1 présente les secteurs et activités pour lesquels l’observation de la Terre par satellites peut apporter un soutien dans leur transformation et/ou adaptation face à la crise climatique. Voici quelques exemples de cas d’applications (liste non exhaustive).



Figure 1 : L'apport de l'observation de la Terre par satellites dans la lutte contre la crise climatique aux différents secteurs et activités (liste non-exhaustive)

4.1 Atténuer les émissions des gaz à effet de serre

Énergie :

Les données satellites permettent en particulier d’assister dans l’implantation d’infrastructures d’énergies renouvelables depuis le choix du site jusqu’à leur opération. En effet, elles peuvent en amont contribuer au design des infrastructures et à l’évaluation de la productivité d’un site potentiel sur la base de l’analyse de données historiques en termes de vents pour l’éolien, d’insolation pour le solaire, du débit des cours d’eau et des couvertures neigeuses pour l’hydroélectricité par exemple. Lors des opérations, les données satellites peuvent venir en support dans l’estimation de la production et dans l’adaptation des procédures en cas de variations météorologiques et des ressources naturelles exploitées disponibles sur la base de prévisions afin d’optimiser l’efficacité des infrastructures. Les données satellites peuvent être également employées pour surveiller les émissions des gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone ou encore le méthane et ainsi localiser les sources d’émissions et évaluer la quantité émise, mais aussi accompagner le secteur dans la transformation de leurs pratiques.

Agriculture :

Les données satellites permettent notamment d’optimiser l’utilisation d’intrants chimiques, source d’émissions de gaz à effet de serre, en évaluant l’état de santé de la végétation des cultures afin d’informer sur la dose à apporter.

Transport :

À titre d’exemple, dans le domaine maritime, les données satellites contribuent à l’optimisation de la route des navires grâce à la surveillance en quasi-temps réel du niveau des mers, des vents, des vagues ou encore des courants, permettant d’économiser en carburant ainsi qu’en temps de parcours.

Industrie, infrastructures et villes :

Comme pour le secteur de l’énergie, les données satellites permettent de suivre les émissions des gaz à effet de serre et ainsi de localiser les sources d’émissions et de déterminer les quantités émises, mais aussi de guider les différents secteurs et leurs activités dans la transformation de leurs pratiques et l’aménagement du territoire.

Foresterie :

Les données satellites permettent de surveiller et contrôler les déforestations légales et de lutter contre les déforestations illégales et la dégradation des écosystèmes associés via la mesure de la densité, de l’étendue, la hauteur des forêts ou encore la détection des changements dans l’utilisation des terres (occupation du sol).

Villes :

L’étalement urbain induit l’artificialisation des sols avec pour conséquence la transformation du sol naturel, agricole ou forestier qui entraîne une imperméabilisation partielle, voire totale. Cela induit notamment une non-absorption du CO2 participant ainsi au réchauffement global. Ainsi dans la lutte contre l’artificialisation des sols, les données satellites permettent de cartographier précisément l’occupation du sol et son évolution au cours du temps et par conséquent, de mesurer et caractériser l’artificialisation pour ainsi la limiter.

4.2 Éliminer le CO2 de l’atmosphère

Agriculture :

Les données satellites permettent de surveiller l’étendue et l’état de santé des cultures et des prairies, d’évaluer leur capacité de séquestration du carbone et d’assister dans les pratiques agricoles pour favoriser la captation du carbone dans les sols (ex., plantation de haies en bordures, restaurations des terres dégradées)

Foresterie :

Les données satellites permettent d’évaluer la biomasse présente dans une forêt (via l’évaluation de sa densité, son étendue et sa hauteur par exemple), utiles pour mieux comprendre la capacité d’absorption du CO2 atmosphérique d’une forêt en fonction de ses caractéristiques. Les données satellites permettent également d’assister dans la pratique de compensation carbone faites par l’intermédiaire de la plantation de nouvelles forêts et la reforestation.

Écosystèmes/Solutions fondées sur la Nature :

Les données satellites permettent de cartographier au cours du temps et de comptabiliser nombreux écosystèmes. C’est le cas par exemple des mangroves qui jouent un rôle clé dans l’atténuation des effets du dérèglement climatique, car elles constituent de puissants puits de carbone avec un fort pouvoir de séquestration. Les données satellites permettent notamment de les dénombrer, d'évaluer leur santé, d'étudier leur évolution, et d'estimer leur capacité à piéger le carbone atmosphérique afin de mieux comprendre leur rôle dans la lutte contre le réchauffement global.

Villes :

Les données satellites permettent notamment d’accompagner les autorités compétentes dans la planification de l’aménagement et la transformation des villes en cartographiant les espaces végétalisés existants ainsi que leur état de santé et en fournissant des recommandations quant à l’optimisation de l’implantation de nouveaux espaces et d’arbres pour favoriser la séquestration carbone en milieu urbain.

4.3 S’adapter aux effets des dérèglements climatiques en cours et à venir et renforcer les capacités pour y faire face

Agriculture :

Les données satellites permettent d’évaluer et de suivre l’état de santé de la végétation (sa croissance et développement), du sol (stock d’eau disponible – humidité dans le sol et dans la zone racinaire pour la végétation) dans le but d’adapter les pratiques culturales (ex., optimisation de l’utilisation des intrants, de l’irrigation, rotation des cultures) en fonction des besoins de la végétation et des conditions météorologiques (ex., sécheresse) dans le but de maintenir la production et de faciliter la préservation voire la restauration du sol et de la biodiversité.

Énergie :

Les données satellites permettent en particulier d’évaluer la quantité d’eau disponible et mobilisable pour le refroidissement des centrales et la production d’hydroélectricité. Les données satellites permettent d’estimer à l’échelle d’un bassin versant et hydrographique le volume des surfaces enneigées ou encore de mesurer le niveau et l’étendue des eaux de surface (plans d’eau et cours d’eau) et le débit des cours d’eau. Ces informations sont indispensables afin de prédire la productivité électrique ou encore d’adapter les pratiques d’utilisation de la ressource en période de tension en particulier en période d’étiage.

Infrastructures :

Les données satellites peuvent suivre les infrastructures tout au long de leur cycle de vie. Elles permettent d’apporter des informations pertinentes quant au site de construction et au design et aux matériaux à utiliser (en tenant compte par exemple de l’ensoleillement, en favorisant la végétalisation). Elles permettent également de fournir une évaluation vis-à-vis de la vulnérabilité des futurs sites de construction aux aléas climatiques grâce à l’historique des données sur les inondations, les sécheresses, les submersions, les feux de forêt et aux projections climatiques permettant ainsi d’évaluer les risques. Après construction, les données satellites permettent également d’évaluer et prévenir l’impact des événements météorologiques extrêmes sur les infrastructures, mais aussi de surveiller l’impact des infrastructures sur l’environnement qui l’entoure notamment sur les écosystèmes (terrestres et aquatiques).

Transport :

À titre d’exemple, dans le cadre de la navigation dans les terres émergées, les données satellites permettent de fournir aux gestionnaires responsables de la gestion, l’exploitation et l’entretien des voies navigables des informations relatives à l’état des fleuves en temps réel (ex., variations du niveau et du débit des eaux de surface, précipitations) nécessaire pour assurer les services associés et prévenir toute menace issue des événements météorologiques extrêmes (inondations, sécheresses) qui pourraient altérer l’état des voies navigables.

Foresterie :

Les données satellites permettent de surveiller et s’assurer de la durabilité des forêts sur un territoire. Elles permettent notamment de faire l’inventaire des forêts et d’évaluer leur bon état de santé (via la détermination de la densité, de l’étendue, la hauteur des forêts) dans le but de mettre en place des mesures de protection, de préservation voire de restauration.

Villes :

Les données satellites apportent un soutien dans le développement et l’aménagement durable des villes. En particulier, elles permettent de cartographier les espaces végétalisés existants ainsi que leur état de santé et assistent les autorités compétentes dans l’implantation de nouveaux espaces afin de rafraîchir les villes, et ainsi lutter contre les vagues de chaleur. Les données satellites contribuent également à détecter et cartographier les îlots de fraîcheur et de chaleur via la mesure thermique de l’efficacité des infrastructures (ex., bâtiments, routes) et ainsi de détecter les défauts. Elles permettent également de détecter des constructions illégales en particulier sur des sites protégés ou encore d’évaluer et de suivre l’artificialisation des sols dans les zones urbaines.

Littoral :

Les zones littorales sont notamment menacées par la montée des eaux et les tempêtes et par conséquent, par le recul du trait de côte ou encore par les submersions marines. Les données satellites contribuent en particulier dans l’évaluation des montées des eaux sur les activités et les populations dans ces régions. Grâce à la haute résolution spatiale combinée à des données altimétriques, il est possible d’identifier les zones potentiellement à risques en fonction des différents scénarios climatiques et ainsi apporter aux autorités compétentes des informations pertinentes quant à l’aménagement du territoire et à la gestion de crises (prévention, alerte et suivi).


Gestion d’urgence :

Les données satellites contribuent depuis la préparation et l’alerte précoce des catastrophes naturelles à la cartographie rapide et à l’analyse post-événement. Dans le cas des inondations par exemple, les données satellites permettent (i) l’évaluation des risques via la prévision des impacts liés aux inondations en identifiant le niveau d’exposition (ex., cartographie des zones potentiellement inondables en fonction du taux de précipitations sur la base de mesures historiques), (ii) la prévention et la gestion du risque en suivant les précipitations, la montée et descente ainsi que l’étendue (morphologie des cours d’eau) des eaux (crues et décrues) en temps réel afin d’avertir les habitants et les acteurs de terrain en cas de menaces imminentes dans le but de sécuriser les populations et d’adapter les productions (mise à l’arrêt) et en cartographiant les zones inondées afin d’appuyer les interventions lors de la crise, (iii) l’évaluation des dommages (en couplant avec des cartes d’occupation du sol), et (iv) l’appui à la reconstruction.

Santé :

Les données satellites permettent d’évaluer la qualité de l’air en mesurant la présence dans l’atmosphère de gaz nocifs et/ou de particules fines dans l’air dans le but d’informer la population des risques de pollutions (via les indices de qualité de l’air) et de fournir des recommandations de bonnes pratiques en cas de pics. Les données satellites permettent également d’évaluer la qualité de l’eau via la mesure des composés présents dans l’eau tels que la fraction des matières en suspension ou la concentration en chlorophylles. Les données satellites permettent également de localiser et suivre les zones d’eau stagnante où des insectes comme les moustiques peuvent proliférer. Ces derniers peuvent être porteurs d’agents pathogènes (virus, bactéries, parasites), nocifs pour l’Homme.

Tourisme :

Les données satellites permettent d’accompagner les acteurs du secteur dans le cadre de leurs activités. À titre d’exemple, dans les zones de baignades (zones côtières, cours d’eau et plans d’eau), les données satellites permettent de les surveiller et d’alerter les autorités compétentes en cas de contaminations des eaux telles que la prolifération d’algues toxiques. Dans le secteur du tourisme de montagne, les données satellites contribuent à l’estimation de l’enneigement des stations en cours de saison. Elles permettent également de prédire l’évolution de l’enneigement à moyen terme sur la base de données historiques afin de mettre en place des stratégies de prévention et d’adaptation adaptées.

Finance & assurances :

Les données satellites permettent avant tout investissement de mieux comprendre et d’évaluer les risques associés à de nouvelles activités et de quantifier les pertes et bénéfices potentiels. Notamment, les risques climatiques sont de plus en plus pris en compte par les institutions financières. Dans le secteur de l’assurance, les données satellites contribuent à l’évaluation des dommages et pertes post-événement afin de faciliter l’estimation des montants d’indemnisation à verser.

Gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) :

Les données satellites permettent de fournir une large gamme de variables hydrométéorologiques telles que l’étendue, le niveau et le débit des eaux, l’humidité du sol, les précipitations, l’évapotranspiration, la qualité de l’eau, nécessaire à l’évaluation et au suivi de l’état de santé d’un point de vue quantitatif et qualitatif des ressources en eau et des milieux aquatiques. Les données satellites permettent par exemple de venir en appui dans la conception de nouvelles infrastructures de services (irrigation, hydroélectricité, eau potable et d’assainissement, etc.) ainsi que dans leurs opérations, dans l’élaboration de stratégie et la planification de l’utilisation de la ressource ou encore dans la gestion des catastrophes hydrométéorologiques (ex., inondations, sécheresses).

4.4 Renforcer la connaissance du climat de ses changements et de ses impacts sur les écosystèmes

Océan :

Les données satellites permettent de caractériser et suivre l’évolution de l’océan et de l’impact du réchauffement global sur ce système à travers des mesures à l’échelle globale de la température, de la salinité, de la hauteur des eaux et de sa qualité. Ces informations sont pertinentes afin de comprendre l’influence de la hausse de la température de l’air et de la concentration du dioxyde de carbone atmosphérique sur la dynamique océanique ainsi que dans son rôle de puits carbone.

Écosystèmes naturels et biodiversité :

Les données satellites permettent de mieux comprendre le rôle des écosystèmes terrestres, aquatiques et marins dans la régulation du climat. Elles contribuent également à établir un état des lieux sur la santé des écosystèmes et à identifier les potentielles pressions extérieures existantes, des informations nécessaires à la mise en place de mesures concrètes et efficaces pour favoriser la protection, la préservation voire la restauration des écosystèmes et de limiter contre le recul de la biodiversité.

Forêts :

Les données satellites permettent de faire l’inventaire des forêts et d’évaluer leur bon état de santé, mais aussi d’estimer la biomasse présente nécessaire pour mieux comprendre la capacité d’absorption du CO2 atmosphérique des forêts en fonction de ses caractéristiques à travers le monde, mais aussi pour mettre en place des mesures de protection, la préservation voire la restauration de ces écosystèmes.

Hydrologie continentale :

L’hydrologie spatiale permet de fournir une large gamme de variables hydrométéorologiques telles que l’étendue, le niveau et le débit des eaux, l’humidité du sol, les précipitations, l’évapotranspiration, la qualité de l’eau, nécessaire à l’évaluation et au suivi de l’état de santé d’un point de vue quantitatif et qualitatif des ressources en eau et des milieux aquatiques peut être estimée. Complémentaires aux données hydrologiques de terrain, les données satellites permettent d’améliorer la connaissance des ressources en eau continentale en particulier sur leur état de santé contribuant ainsi à l’évaluation de l’impact des pressions climatiques sur la ressource.

L’observation de la Terre par satellites se place ainsi comme un outil innovant dans la lutte contre la crise climatique. Mais pas seulement ! Participant à la transformation des sociétés ainsi qu'aux renforcements des capacités et à l'adaptation aux effets du dérèglement du climat, elle permet plus largement d'atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) de l'Agenda 2030 en réduisant les inégalités au regard de l’accès à l’information, un levier crucial pour atteindre à la fois les défis socio-économiques et environnementaux qui nous attendent.


RÉFÉRENCES :

[1] IPCC, 2021: Summary for Policymakers. In: Climate Change 2021: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Sixth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Masson-Delmotte, V., P. Zhai, A. Pirani, S.L. Connors, C. Péan, S. Berger, N. Caud, Y. Chen, L. Goldfarb, M.I. Gomis, M. Huang, K. Leitzell, E. Lonnoy, J.B.R. Matthews, T.K. Maycock, T. Waterfield, O. Yelekçi, R. Yu, and B. Zhou (eds.)]. In Press. Disponible ici.

[2] IPCC, 2022: Summary for Policymakers [H.-O. Pörtner, D.C. Roberts, E.S. Poloczanska, K. Mintenbeck, M. Tignor, A. Alegría, M. Craig, S. Langsdorf, S. Löschke, V. Möller, A. Okem (eds.)]. In: Climate Change 2022: Impacts, Adaptation, and Vulnerability. Contribution of Working Group II to the Sixth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [H.-O. Pörtner, D.C. Roberts, M. Tignor, E.S. Poloczanska, K. Mintenbeck, A. Alegría, M. Craig, S. Langsdorf, S. Löschke, V. Möller, A. Okem, B. Rama (eds.)]. Cambridge University Press. In Press. Disponible ici.

[3] OMS et UNICEF, 2,1 milliards de personnes n’ont pas d'eau potable à domicile et plus du double ne disposent pas d’assainissement sûr, communiqué de presse sur le site internet de l’OMS, Genève, 12 juillet 2017. Disponible ici.

[4] IPBES, Summary for policymakers of the thematic assessment of land degradation and restoration, sur le site internet de IPBES, 2018. Disponible ici.

[5] IPBES, Summary for policymakers of the global assessment report on biodiversity and ecosystem services of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, 2019. Disponible ici.

 

À propos de l’auteur : Jennifer Fernando est conseillère en stratégie environnementale basée sur l'utilisation des données de l'observation de la Terre par satellites. Elle accompagne les acteurs des territoires (établissements publics, collectivités, entreprises, ONG/associations/fondations, citoyens) qui souhaitent utiliser les données et images satellites dans le but de faciliter l'évaluation, la gestion et le suivi des ressources naturelles (eau, forêt, sol, air, écosystèmes, biodiversité) et des changements globaux (pollution, pénurie, dérèglement climatique). Elle accompagne également les acteurs de la communauté du spatial (start-ups, PME, ETI, agences spatiales) qui développent des missions spatiales et/ou exploitent les images et données satellites et qui souhaitent développer des applications au plus proche des besoins des utilisateurs finaux et les valoriser auprès d'eux. Contact : contact@jennifer-fernando.com Site internet : https://www.jennifer-fernando.com



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